A&L :: Lectures in the Mood #18

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13 avril 2023

L’émission littéraire proposée par Josiane Guibert qui vous fait partager ses découvertes, ses points d’intérêts et ses coups de cœur.

Au Sommaire :
Le programme de cette émission sera lié à deux événements dans le département du Loiret.
 
1- La tenue à Châteauneuf-sur-Loire de l’exposition photographique Les tirailleurs de la Loire, du 15 avril au 15 mai.
On a eu récemment l’occasion de voir le film Tirailleurs dont l’action se situe pendant la guerre de 14-18.
L’exposition Les tirailleurs de la Loire met en lumière le rôle et le sort des troupes coloniales en 1940. Pour en savoir plus sur cette question, je vous recommande quelques ouvrages :
 
Anthony Guyon, Histoire des tirailleurs sénégalais (Perrin, 2022)
 
Fabien Théofilakis, Les prisonniers de guerre français en 40 (éditions Fayard, 2022)
 
Jean-Yves Le Naour, La Honte noire. L’Allemagne et les troupes coloniales françaises, 1914-1945 (Hachette Littératures, 2003)
 
Nicolas Mengus et Christian Le Corre, Mai-Juin 40 : Le regard de l’envahisseur (éditions Ouest France, 2021)
 
Paul Gaujac, Les troupes coloniales dans la campagne de France (Histoire et collections, 2010).
 
et nous terminerons cette évocation par un extrait d’un poème du recueil Hosties noires de Léopold Sédar Senghor, paru en 1948 aux éditions du Seuil.
 
2-Le festival Ozélir organisé par le département du Loiret et qui, par une centaine d’événements, met en vedette les livres et la lecture.
Le programme de ce festival, qui se tiendra du 5 au 23 mai dans différents lieux du Loiret, sera en ligne sur le site du département à l’adresse : loiret.fr/ozelir
 
Lors de la soirée d’ouverture, le mardi 9 mai à 18 h 30 à l’hôtel du département, deux auteurs seront présents :
Éliette Abécassis pour son roman Un couple, aux éditions Grasset
Grégoire Delacourt pour son roman Une nuit particulière, aux éditions Grasset
 
En mai, le festival Ozélir sera largement présenté sur notre radio !
À très vite donc pour de plus amples détails.

Les Tirailleurs sénégalais ; De l’indigène au soldat de 1857 à nos jours

Anthony Guyon, éditions Perrin 2022

Si les études portant sur le rôle des tirailleurs sénégalais durant les deux conflits mondiaux sont légion, rares sont les livres qui retracent toute leur histoire de leur création par décret impérial en 1857 à leur disparition en 1960 après la dissolution de l’AEF et de l’AOF.  Pourtant, ce corps d’armée – qui désigne en réalité tous les soldats africains de couleur qui se battent pour l’Empire – fait partie intégrante de l’histoire de France. En effet, de la conquête de Madagascar en 1895 aux guerres d’indépendance (Indochine, Algérie…) en passant bien sûr par les première et seconde guerres mondiales, ces troupes coloniales sont de tous les combats.

Mais comment l’état-major français considère-t-il les tirailleurs pendant un siècle ? De quelle façon son attitude évolue-t-elle au fil des années ? En quoi influence-t-elle celle de l’opinion publique métropolitaine qui, pendant longtemps, ne voit en ces soldats que la personnification du célèbre slogan « Y a bon » de la marque Banania ? Revenons sur les moments de gloire (la défense de Reims en 1918, la bataille de Bir-Hakeim en 1942, etc.) autant que sur les tragédies (les exactions commises par la Wehrmacht en 1940 ou encore le massacre de Thiaroye en 1944), Anthony Guyon répond à toutes ces questions parmi beaucoup d’autres. Partant, il propose la première synthèse complète et nuancée sur cette armée mythique et surtout sur les hommes qui la composent. S’intéressant aux trajectoires collectives mais aussi aux destins individuels (tels ceux de Lamine Senghor ou de Addi Bâ), il bat en brèche les poncifs récurrents et rend aux tirailleurs sénégalais la place qu’ils méritent dans l’histoire.

Enseignant agrégé et docteur en histoire, Anthony Guyon a consacré sa thèse aux tirailleurs sénégalais de 1919 à 1940. Ses travaux reposent notamment sur l’étude du fond de Moscou au SHD de Vincennes et de celui de nombreux centres d’archives dans le sud de la France.

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Fabien Théofilakis, Les prisonniers de guerre français en 1940, (éditions  Fayard, 2022).

À l’été 1940, des millions de Français se mettent à écrire, à leurs maires, sous-préfets et préfets, mais aussi à des organismes internationaux et jusqu’au pape, pour savoir ce que sont devenus leur père, leur époux, leurs enfants. En six semaines à peine, entre le 13 mai et le 22 juin 1940, la défaite militaire se transforme en débâcle et la captivité concerne désormais presque deux millions de soldats détenus par les Allemands en territoire français. Captivité transitoire, première étape d’un emprisonnement long, parfois douloureux, dans le Reich, captivité fondatrice aussi et mémoire oubliée de la Seconde Guerre mondiale.

Au nord de la Loire comme le long de l’Atlantique, la France se couvre de camps de prisonniers, les Frontstalags. Véritable défi logistique, social et politique, la captivité devient un enjeu central, pour les familles qui attendent, pour le régime de Vichy qui cherche à affirmer sa souveraineté comme pour les autorités allemandes qui imposent leur ordre de vainqueur, mais aussi pour les instances internationales, du Comité international de la Croix-Rouge à l’ambassade des États-Unis, en passant par le Vatican.

Donner à voir, faire ressentir, amener à comprendre ce qu’a été une captivité française en France, celle de 1940 : tel est l’objectif de cet ouvrage collectif qui varie les échelles et les points de vue pour proposer une histoire au carrefour de la défaite, de l’Occupation et de la Collaboration – un essai qui, à partir d’archives françaises et étrangères ainsi que de nombreux documents iconographiques, mêle relations internationales et quotidien à hauteur d’homme.

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Jean-Yves Le Naour, La Honte noire. L’Allemagne et les troupes coloniales françaises, 1914-1945 (Hachette Littératures, 2003).

Après la première guerre mondiale, les Allemands organisent une campagne de propagande internationale contre la présence de troupes coloniales françaises dans leur pays : c’est la « honte noire ». Elle repose sur des accusations mensongères de viols systématiques des femmes blanches par les soldats africains en Rhénanie occupée. Ces attaques racistes visent à convaincre l’opinion publique internationale – notamment nord-américaine, sensible à la question noire – et les gouvernements étrangers que la France est une ennemie de la Kultur et de la civilisation européennes. Haineux et militaristes, les Français mépriseraient les Allemands au point de les faire « garder » par des Noirs, et désireraient abâtardir leur race par le mélange des sangs et la contamination syphilitique !
Cette propagande a une postérité : pour expliciter sa conception de la pureté raciale, Hitler utilise la « honte noire » dans Mein Kampf. En France, Jean Moulin, préfet d’Eure-et-Loir, accomplit en 1940 son premier acte de résistance en protégeant de la haine nazie les soldats coloniaux prisonniers, assassinés par milliers par les vainqueurs.
Mais à l’automne 1944, l’armée française procède à son tour à un vaste « blanchiment » de ses effectifs en écartant les soldats coloniaux au profit de jeunes métropolitains : il faut occuper l’Allemagne avec une armée blanche…
Jean-Yves Le Naour, à l’aide d’archives inédites, met en évidence avec clarté une manifestation mal connue du racisme européen d’une guerre mondiale à l’autre.

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Nicolas Mengus et Christian Le Corre, Mai-Juin 40 : Le regard de l’envahisseur (éditions Ouest France, 2021)

Le présent ouvrage revient sur la vision allemande de la bataille de France de mai-juin 1940. Inédit, issue de la collection d’un particulier de plus de 2 000 clichés, ce livre présente essentiellement des photographies « privées », en ce sens qu’elles ont été réalisées par les soldats eux-mêmes à des fins de « souvenirs » qu’ils ramèneront chez eux – ce en quoi ils remplissent le même rôle que le propagande officielle. Ces clichés retracent le quotidien d’une guerre – entre les combats et les moments de repos, entre la mort des camarades et la victoire sur les Pays-Bas, la Belgique et, surtout, sur la France – et ses conséquences : l’Occupation et l’Annexion, le partage de la France et la ligne de démarcation… Un panorama de la campagne de France comme vous ne l’avez jamais vue, à travers l’œil de l’envahisseur.

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Les troupes coloniales dans la campagne de France, septembre 1939-juin 1940, par Paul Gaujac, (éditions Histoire et collections, 2010).

En 1941, des témoignages sont recueillis auprès des combattants coloniaux de la campagne de France de mai et juin 1940, puis lus à la radio et enfin regroupés dans un ouvrage mis a la disposition du grand public, Mémorial de l’Empire, Pour le gouvernement et l’état-major de l’époque, il s’agit d’une action de circonstance au moment où il faut relever le moral de la nation abattu par la soudaine défaite et où le regard se tourne vers l’Empire colonial dont on cite la fidélité et la valeur de ses soldats.

Pour les Coloniaux eux-mêmes, convaincus de n’avoir pas démérité sur le front des combats et lors de la retraite, c’est une manière de leur rendre hommage et de vanter leur esprit de sacrifice et leur abnégation, tout en n’hésitant pas à témoigner des graves exactions commises par les troupes allemandes à l’encontre de certaines unités de la Force Noire.

C’est dans le même esprit que, de 1945 à 2010, tandis que se déroulent les combats en Indochine et en Algérie, puis ceux des opérations extérieures, les revues successives des Troupes coloniales présentent dans leurs colonnes tous les dix ans et à chaque anniversaire le récit des combats de 1940.

Il y a là une constance et une fidélité à nulle autre pareille.

À l’occasion du soixante-dixième anniversaire de la campagne de France, de l’appel du 18 juin, du ralliement de l’Afrique équatoriale française à la France Libre et alors que la France célèbre également le cinquantième anniversaire des indépendances africaines et malgache, il a paru utile de rééditer ces témoignages initiaux, sans modifier leur rédaction et leurs contenus, reflets des modes et préoccupations de l’époque. Dans un souci de pédagogie, ces textes ont été largement complétés par les historiques des grandes unités (corps d’armée et divisions coloniales) et formations indépendantes, et abondamment illustrés à partir des collections du musée des Troupes de Marine et de collectionneurs avertis. À la fois travail d’histoire sur les archives de la Défense, mise en valeur du patrimoine et des traditions militaires ainsi que rappel mémoriel et illustration des valeurs civiques, cet ouvrage est un hommage aux combattants dont il perpétue le souvenir et contribue à transmettre les valeurs aux jeunes générations de toutes origines.

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Deux extraits de poèmes du recueil Hosties noires de Léopold Sédar Senghor, paru en 1948 aux éditions du Seuil

Prisonniers noirs je dis bien prisonniers français, est-ce donc vrai que la France n’est plus la France ?

Est-ce donc vrai que l’ennemi lui a dérobé son visage ?

Est-ce vrai que la haine des banquiers a acheté ses bras d’acier ?

Et votre sang n’a-t-il pas ablué la nation oublieuse de sa mission d’hier ?

Dites, votre sang ne s’est-il mêlé au sang lustral de ses martyrs ?

Vos funérailles seront-elles celles de la Vierge espérance ?

                                                                                                                      Tyaroye, Paris, 1944

Vous Tirailleurs Sénégalais mes frères noirs à la main chaude sous la glace et la mort
Qui pourra vous chanter si ce n’est votre frère d’armes, votre frère de sang ?

Je ne laisserai pas la parole aux ministres, et pas aux généraux,
Je ne laisserai pas – non ! – les louanges de mépris vous enterrer furtivement.
Vous n’êtes pas des pauvres aux poches vides sans honneur
Mais je déchirerai les rires banania de tous les murs de France

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Un couple, par Éliette Abecassis aux éditons Grasset

Un couple qui dure serait-il la plus grande aventure des temps modernes  ?
Alice et Jules vivent ensemble depuis soixante ans.
Par un tour de force littéraire, Eliette Abécassis remonte le cours de leur relation amoureuse, étape par étape, pour nous en révéler les nuances, les rêves, les désirs, les trahisons et les regrets.
Vieillesse, routine, retrouvailles, désamour, haine, jalousie, enfants, mariage, passion : le film défile à l’envers, par une série de rebondissements, passant de l’ère des réseaux sociaux à la chute du mur de Berlin, Mai 68, la guerre d’Algérie…
Voici le roman de l’amour pérenne, envers et contre tout : un remède au cynisme et à la solitude de notre époque.

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Une nuit particulière, de Grégoire Delacourt aux éditions Grasset

«  J’avais envie d’amour. Envie d’une grande nuit d’amour. D’une rencontre. De ce moment étrange, poétique parfois, qui change le cours de l’eau d’une vie.
Je voulais comprendre jusqu’où l’on peut aimer, jusqu’où l’on peut aller vers l’autre et ressentir que chaque pas est un choix. Je rêvais d’entendre à nouveau quelques airs d’opéra, des arias de douleur et de beauté, et retrouver ces hommes et femmes capables de se jeter dans le vide par amour. Parce que c’est vivre sans amour qui est l’enfer.  »
G.D.
 
Elle s’appelle Aurore. Et pourtant c’est au crépuscule qu’elle rencontre Simeone, un soir d’automne, à Paris, aux abords du local d’un groupe de parole. Elle quitte une réunion, lui arrive pour la suivante. Il attend, l’observe, intrigué, mais c’est elle qui s’adresse à lui. Le temps d’une cigarette, la conversation s’engage.
Après trente ans d’amour fou, Aurore sait qu’elle va être quittée par son mari. Simeone a la gorge mangée par un crabe, il lui reste peu de temps à vivre, il refuse de lutter et sa femme a peur. Alors les deux inconnus s’avancent ensemble dans une nuit qui ne ressemblera à nulle autre, des rues de Paris à un bar de nuit, d’une chambre d’hôtel à un aller-retour en taxi vers Roissy et une évasion vers les rivages de l’aube. Première ou dernière nuit, tous deux l’ignorent. Ils ne sont sûrs que d’une chose  : au matin, après cette bouleversante nuit d’amour, rien ne sera plus jamais comme avant. Car l’amour ne s’écrit jamais à l’avance.
Romanesque, poétique, fulgurant : un magnifique roman d’amour.

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