Obaldia, immortel défunt                                         4/02/2022

René de Obaldia, qui vient de mourir à 103 ans était un homme de qualité, un homme du monde, un honnête homme.

Auteur dramatique, il pratiquait une langue incomparable, faite d’insolence, de fulgurances et de poésie. Elle était saupoudrée d’humour, d’esprit, d’insolite et de trouvailles pétillantes. Il a excellé dans l’art du théâtre, des poèmes et des parodies.

Un des premiers dialogues qu’il a conçus s’intitule « le défunt ». Tout Obaldia est déjà dans ce texte : deux femmes se recueillent au cimetière sur la tombe d’un défunt. Julie, l’épouse, Madame de Crampon, son amie, qui fut une éphémère  maîtresse de Victor… Le veuvage, épreuve de la vie, nourrit l’échange entre les deux femmes :

Madame de Crampon : « écoutez, mon enfant, moi aussi j’ai été veuve et j’ai connu bien des épreuves au cours de mon existence… »

Julie : « Vous en mourrez, Madame de Crampon, vous en mourrez »

Madame de Crampon : « Allons, vous êtes encore jeune, Julie, la terre continue de tourner, les feuilles de grimper aux arbres, les petites filles sautent à la corde, l’océan joue du biniou, les oiseaux cuicuitent… »

Dans un genre différent, c‘est lui qui a déniché ce qu’il appelle le plus beau vers de la langue française en s’autoproclamant, à juste titre, l’auteur de cet alexandrin royalement écologique. Précédé d’un vers introductif pour souligner la rime, Il se formule ainsi :

« C’était l’heure divine ou, sous le ciel gamin,

Le geai gélatineux geignait dans le jasmin ! »

Dans son théâtre, il avait aussi le génie des noms de personnages pour camper les caractères. Dans une de ses pièces, il représente un couple sans histoire, pour tout dire un peu gris et sans grand rayonnement ; ils se dénomment les Paniquel.

Une de ses meilleures compositions s’intitule « les Bons Bourgeois » : Obaldia met en scène une famille parisienne, en mai 1968, directement inspirée des femmes savantes de Molière et, pour cette raison, composée en alexandrins.

Le père est industriel, la mère brasse de l’air, les filles sont, l’une,  militante MLF, l’autre, fleur bleue ; cette dernière collectionne les soupirants, tantôt énarque, tantôt écologiste.

Obaldia s’en donne à cœur joie pour étriller les travers de son époque et fustiger les caractères et les comportements :

S’agissant par exemple du mariage bourgeois et des convenances dans un certain milieu, il analyse les choses  ainsi :

Alexandre, l’écologiste :

  • Mais à vos chers parents ? leur avez-vous conté

Qu’ils allaient transiter, chacun à leur manière :

Et beau sera le père et belle votre mère…

Chantal, la fleur bleue :

  • Hélas ma mère est contre et mon père n’est pour.

Mais c’est toujours ainsi lorsqu’il s’agit d’amour.

Alexandre :

  • Enfin suis-je galeux, ai-je l’air d’une frappe ?

Faut-il dans leur esprit, vous marier au pape ?

Ai-je jusqu’à ce jour fait sauter une banque ?

Me prend-t-on pour un gueux ou pour un saltimbanque ?

Volè-je, torturè-je ou même me droguè-je ?

Veut-on me voir tout nu ? Je vous écoute, qu’ai-je ?

Chantal :

  •  Vous avez, mon ami, que vous êtes fauché,

C’est aux yeux de ma mère un immense péché.

Un des meilleurs ouvrages de l’oeuvre d’Obaldia est dénommé « Innocentines ». Il s’agit d’un recueil de poèmes, de saynètes, qui permet d’apprécier l’éclectisme de l’auteur dans son inspiration vagabonde.

Un morceau s’intitule « En ce temps-là » :

il met en scène Jésus et ses apôtres avec une indulgence ironique et attendrie et l’évocation de la frousse confirmée dans les évangiles, par la scène du jardin des Oliviers avant le Golgotha :

Par exemple :

  • « Jacques et André, les fils de Zébédée,

ne connaissaient même pas l’a b c d,

en ce temps –là, comme l’école n’était pas obligatoire,

qu’on ne savait pas lire et encore moins écrire,

c’était à qui raconterait des histoires…

  • En gros les disciples étaient bouchés,

c’étaient de pauvres mâles

qui comprenaient que dalle

à l’éternité.

C’étaient de pauvres hommes

qui vivaient avec Dieu en plein Capharnaüm ».

Pour en revenir à Obaldia, il me reste à saluer deux dimensions  du personnage : le prisonnier et le centenaire.

  • Il a enduré, pendant quatre ans, la vie d’un camp de concentration en Silésie dans des conditions éprouvantes. Il en a parlé avec pudeur et élégance. Il s’intéressait trop aux autres pour s’attarder sur lui-même.
  • S’agissant du grand âge, il se plaisait à citer un aphorisme de Picasso :  « il faut beaucoup de temps pour devenir jeune » et tant qu’à faire, un de lui-même : « Pour devenir centenaire, il faut commencer jeune ».

Juste avant l’apparition de la pandémie covidienne, j’ai eu la chance d’accueillir le Maître pour la représentation d’un spectacle intitulé « Pastiches et Parodies » qui contenait plusieurs de ses textes. Obaldia, âgé alors de 101 ans, nous a confié avoir passé une bonne soirée et échangé avec la troupe sur ses souvenirs de théâtre en nous livrant une savoureuse imitation de Michel Simon quand il interprétait « Du vent dans les branches de Sassafras ».

                                                                                               Luc  Ziegler

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N° 242 Avril-Mai-Juin – vente en kiosque ou par abonnement.

Au sommaire : La suite de l’aventure DELGRES – qui proposera son nouvel album « 4:00 AM » à partir du 9 avril – 10 pages consacrées au retour du trio au nom d’insurgé et comme toujours des interviews, des chroniques consacrées aux nouveautés et sorties d’album… à découvrir!

Jazz Magazine N°734 – Février 2021 – Vente en Kiosque ou par abonnement.

Jazz Magazine en partenariat avec Jazz News propose pour son 734ème numéro de février 2021, un numéro spécial consacré au jazz français avec un appel à « RESISTANCE(S) ! – Des entretiens, des rencontres et des témoignages avec tout ce qui compose le jazz contemporain pour « penser l’avenir » après un an de ralenti ou d’arrêt de la création artistique, des concerts et festivals.

Mais aussi :

  • une redécouverte avec l’article consacré au film « Le blues de Ma Rayney » de Chadwick Boseman disponible sur Netflix,
  • un hommage au GRAND Claude Bolling par Patrick Frémeaux,
  • les disques, les Chocs, les nouveautés & rééditions,
  • et le Grand dossier !

Vive le jazz !

Shemekia Copeland en couverture du numéro 241 – premier trimestre 2021

Un dossier consacré à Shemekia Copeland, la grande chanteuse de blues, qui a sorti son nouvel album «  Uncivil War » qui devrait figurer dans votre discothèque.
« Le neuvième album de Shemekia, Uncivil War est produit par Will Kimbrough et comprend de nombreux invités comme Jason Isbell, Steve Cropper, Christone «Kingfish» Ingram, Webb Wilder, The Orphan Brigade. L’album est sorti le 23 octobre 2020. » …et l’entretien à lire absolument.

Au sommaire aussi de ce 241eme numéro de SoulBag un entretien avec Benoit Blue Boy, un des champions de la scène blues française, qui a produit son 17e album avec son compère et talentueux Nico Duportal….

Au sommaire, aussi, la jeune et talentueuse américaine Vanessa Collier qui conjugue de nombreux talents et à découvrir son dernier album Heart on The Line …

Vanessa Collier - Couverture de l'album Heart On The Line.jpg

Au sommaire également du °241 des entretiens et des interviews avec Kim Wilson, Big Crown Records, Johnny Nicholas, Aaron Fraser, Emma Donovan, Sony Green et toutes les chroniques nouveautés comme les rééditions … et il y en a beaucoup.
Encore un numéro indispensable vendu en kiosque ou par abonnement 🤗.

Éric Clapton : La vie en Blues un documentaire de Lili Fini Zanuck (GB, 2017) à suivre vendredi 8 janvier 2021 sur la chaine Arte à 22 h 25.

Un portrait saisissant et captivant sur Éric Clapton : sa vie, son oeuvre, ses tragédies, ses addictions, ses passions et un musicien hors pair qui a joué avec les plus grands et une discographie importante qui a fait une place à Big Bill Broonzy et Robert Jonhson et d’autres bluesmen.

Le documentaire sera suivi à 0 h 35 du concert inédit d’Éric Clapton : Slowhand at 70 – Live at The Royal Albert Hall (Londres, mai 2015).

Eric CLAPTON : Homme d’une grande passion que l’on retrouve avec le titre Layla…

4 rééditions : le concert mythique de Benny Goodman en 1938 au Carnegie Hall – la résurrection de Count Basie en 1952 avec son nouveau chanteur – Duke Ellington à Newport édition 1956 – Sidney Bechet l’unique.

Benny Goodman – The Complete Legendary 1938 – Carnegie Hall Concert

Benny Goodman : un concert mythique enregistré en 1938 au Carnegie Hall à New York avec une mixité de musiciens et des invités prestigieux : Lester Young, Count Basie, Teddy Wilson, Buck Clayton, Fletcher Henderson… du jamais vu où pour la circonstance des musiciens blancs et noirs jouent ensemble à l’invitation de Benny Goodman. Deux heures de concert, des pubs à découvrir et une partie d’un show radiodiffusé 2 jours plus tard. Une très belle aventure musicale et un double album exceptionnel. Benny Goodman Carnegie hall concert. The complete legendary 1938 chez American Jazz Classics.

Count Basie Swings – Joe Williams Sings

Count Basie avec son nouveau chanteur Joe Williams, c’est la seconde version de la machine à swing en 1952 après celle des années 40 qui eut un très grand succès jusqu’au début des années 60. Une magnifique collaboration entre piano et chant qui réinvente le style avec un chanteur mais aussi arrangeur d’exception. Joe Williams permet à l’orchestre de Count Basie de se réinventer et de « groover » mais aussi d’obtenir un grand succès jusque dans les années 60. Un bel album produit par Essential Jazz Classics – 24 titres avec de nombreux bonus.

The Unique Sidney Bechet

Sidney Bechet. Encore un album de légendes et une belle réédition avec toujours cette rage de jouer de Sydney Bechet dont on ne se lasse pas.
Des bonus irrésistibles comme summertime, mais surtout Strange fruit dans une version très caractéristique, totalement différente de celle par exemple de Billie Holiday. Le légendaire «Petite Fleur » clôture l’album. Les mélodies chères à Sidney Bechet sont toujours présentent avec un coup de cœur pour « Si tu voyais ma mère ». Sidney Bechet est accompagné par « la fine fleur » des musiciens comme Sidney de Paris, Pops Foster, Manzie Johnson, Jonas Jones, Walter Page entre autres… Un album incontournable et à figurer dans votre discothèque. The Unique Sidney Bechet est produit par Matchball records

Ellington At Newport – The Complete 1956 Performances

Duke Ellington. Une opportune réédition qui nous permet de replonger dans le Newport Jazz Festival de 1956. Duke Ellington est au sommet de son art avec des solistes très talentueux comme Paul Gonsalves, Clark Terry, Johnny Hodges et bien d’autres. Pour mémoire le concert qui eu lieu le 7 juillet 1956 se termina par une standing ovation. On retrouve 15 titres, l’ambiance et les performances sur le CD 1 et 17 titres dont 9 enregistrements studios et 3 broadcast et plusieurs autre découvertes sur le CD 2.

Encore un album à avoir dans sa discothèque ! Duke Ellington The Complete Newport 1956 Performances est produit par American Jazz Classics.

N°99 – Trimestriel – Janvier-Février-Mars 2021 – Vente en kiosque ou par abonnement.

Blues Magazine propose, en tête d’affiche, l’interview du grand bluesman Johnny GALLAGHER qui vient de rejoindre pour notre plus grand plaisir le label français Dixiefrog. Une interview pour partir à sa découverte, connaître ses projets musicaux et d’autres bonnes nouvelles à découvrir…

On retrouvera aussi l’interview de Fred CHAPELLIER qui occupe une place importante sur la scène blues en France et qui parle de la sortie de son double album best of retraçant ses 25 ans de carrière avec la complicité de Dixiefrog, mais aussi des références musicales qui l’ont inspiré et des infos sur son avenir immédiat.

Toujours au sommaire du N°99 l’interview de Gaëlle BUSWEL qui trace sa route avec une énergie incroyable et beaucoup d’autres rencontres avec Philippe Ménard, Dust’in Roses, Bette Smith, Blue Fever et Mingo Balaguer… plus l’incontournable sélection de Cd et dvd… et pour les musiciens apprentis ou chevronnés des informations pratiques avec la batterie de Been’s… l’harmonica de Greg…. un vrai plaisir.